Sambre - Yslaire

Le destin tragique d'une famille

1847, la deuxième génération des Sambre enterre son père, Hugo. Les deux enfants, Bernard et Sarah restent seuls avec la veuve qui ne tarde pas à se consoler. Hugo laisse un terrible héritage à sa descendance. On le disait fou, possédé par la croyance d'une malédiction familiale dont la couleur des yeux serait à l'origine. Il  a consacré les dernières années de sa vie à en écrire la théorie. Sa fille Sarah, convaincu de devoir lui succéder, entreprend d'achever son ouvrage "La guerre des yeux".

De son côté, Bernard ne porte pas le deuil de la même manière. Bien moins investi que sa sœur dans les superstitions paternelles, il ne se laisse pas effrayer quand il rencontre pour la première fois la jeune Julie, une braconnière aux yeux rouges sang. Leur liaison ne dura qu'une nuit, une étreinte charnelle dans le sinistre caveau de famille. Cette union scellera leur destin. Et alors qu'à Paris se prépare une nouvelle révolution, la famille Sambre s'apprête à vivre des heures bien sombres.

Un contexte historique passionnant

Faite de rouge et de noir, comme la couleur des yeux de ses deux principaux protagonistes, la série débutée en 1986 a eu tout le temps de laisser le dessin de son auteur gagner en qualité et en maturité, jusqu'à proposer de réels tableaux au charme et à la sensibilité subtils. S'inscrivant dans le contexte historique de la révolution de 1848, c'est la naissance de la deuxième République que nous suivons parallèlement aux déboires de nos deux amants.

Paris y est aussi réaliste que ses quartiers sont crasseux et sa pauvreté sans égale. Les barricades, le drapeau rouge, les monuments, la pierre, le sang, Yslaire illustre cette période agitée avec un talent qui nous transporte et l'on entendrait presque les cris des manifestants et les pas battre le pavé.

Un romantisme exacerbé

Tel Roméo et Juliette, Bernard et Julie auront connu un amour bien bref et tourmenté. Mais liés par leur destinée, les deux jeunes n'auront de cesse de se chercher espérant se retrouver et ainsi vivre leur amour. Mais la tragédie qui marque les Sambre ne leur laissera aucun répit.

Chacun des titres de ces albums transpire de poésie et de romantisme et les textes, qu'ils soient au départ de Balac puis ensuite de Yslaire en solo, constituent pour la plupart des répliques d'une magnifique beauté. Inspiré par les grandes œuvres de la littérature du XIXe siècle, Bernard Yslaire leur rend un merveilleux hommage.

"Je t'en prie…Sois tendre et ne nous déçoit pas…
Je fermerai les yeux si tu m'entrouvres ton âme. Mon coeur n'a pas de paupières, lui…
" (Julie Saintange - 1847)
Une œuvre majeure de la bande-dessinée

Sambre est un monument de la bande-dessinée franco-belge. Une de ces œuvres majeures qui m'a appris à l'adolescence que la BD pouvait également s'adresser aux adultes, pour mon plus grand bonheur. Il aura fallu attendre sept ans entre 1996 et 2003 avant que ne reprenne la série. Le cinquième tome n'est pas un épilogue mais l'introduction d'un nouveau cycle, sur la destinée de la troisième génération.

C'est une fresque familiale épique, s'étalant maintenant sur plusieurs générations, depuis que Bernard Yslaire a entamé de remonter l'arbre généalogique, nous emportant dans les méandres de son récit avec le cycle "La guerre des Sambre". Dans la tête de son auteur cette série en train de devenir une immense saga qui s'étendrait de la Révolution Française à la Préhistoire…

La destinée des Sambre nous réserve toujours autant de mystères et Glénat s'apprête à nous livrer un nouveau chapitre des origines de cette tragédie dans un cycle, "Werner et Charlotte", dont le premier tome paraitra en octobre. Mais nous en reparlerons le moment venu…

Les albums :


I Plus ne m'est rien… (1986)
II Je sais que tu viendras (1990)
III Révolution, révolution…(1993) (devenu "Liberté, liberté…" avec la réédition de 2003)
IV Faut-il que nous mourrions ensemble… (1996)
V Maudit soit le fruit de ses entrailles… (2003)

Scénario : Yslaire (Balac pour le 1er tome) - Dessins : Yslaire 
Editeur : Glénat - Collection Caractère.  


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