Panier de singe - Ruppert et Mulot


La parution de La Grande Odalisque, chroniquée dans ces pages la semaine dernière, m’a donné une furieuse envie de me (re)plonger dans l’œuvre de Ruppert et Mulot. Leurs premiers travaux, publiés dans diverses revues obscures, puis dans d’autres à audience un peu plus large (Ferraille par exemple), avaient permis aux deux auteurs de publier un recueil à L’Association, Safari Monseigneur. Suivra Panier de singe, couronné en 2007 par le prix Révélation à Angoulême.

Panier de singe est un recueil d’histoires courtes, reliées entre elles par des scénettes aux personnages récurrents. Il est impossible d’en résumer le sens, un mot qu’on se gardera bien d’ailleurs d’utiliser pour parler des albums de Ruppert et Mulot. Ici, tout est sens dessus dessous, les perspectives, les dialogues,…

On retrouve, entre autres, deux journalistes cherchant à filmer des supposés zoophiles à la ménagerie du Jardin des plantes, deux portraitistes de l’étrange, des duellistes sur fond d’avaleurs de sabres sado-masos, une partouze de mutilés,… Une galerie de portraits tout ce qu’il y a de plus classique, quoi !

Derrière ce descriptif un peu trash se cache surtout un humour féroce et une grande recherche formelle. Et c’est cette alliance qui rend l’album véritablement génial. En bons disciples de l’OuBaPo (dont ils doivent sûrement être proches), Ruppert et Mulot explorent les possibilités narratives de la bande dessinée : les cases se lisent parfois verticalement, parfois une seule contient toutes les phases d’un mouvement (la course d’aveugles) ; on retrouve également des phénakistiscopes (on peut d’ailleurs les voir animés ici) et des stéréoscopes.

Mais la recherche formelle a souvent ses limites et peut se révéler gonflante sur la durée. C’est là qu’intervient l’humour : on se laisse emporter par le flot de vilaines intentions, de rires nerveux et grinçants, par cette absence de gêne et de limites.

Panier de singe est un petit chef d’œuvre. Bien sûr, il s’agit sûrement là d’un avis très subjectif ; certains n’y verront peut-être qu’un enchaînement incohérent de séquences, qui plus est à l’humour douteux. Mais cette façon de triturer la narration et cette drôlerie brutale définissent un style assez unique et qui est propre à Ruppert et Mulot ; et j’y adhère complètement !




Scénario : Florent Ruppert - Dessins : Jérôme Mulot 
Editeur : L'Association - Collection Ciboulette - Récit complet.  





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