Gatsby le magnifique

Il est toujours difficile de s’attaquer à un mythe ; au-delà du plaisir de rendre compte d’une œuvre qu’on chérit pointe souvent la peur de décevoir, de ne pas rendre justice à la grandeur du texte. En la matière, Gatsby le magnifique est sans conteste un des romans mythiques de la littérature américaine. Il suffit de se rappeler la polémique autour de la récente traduction de Julie Wolkenstein pour se convaincre que l’entreprise de Stéphane Melchior-Durand et Benjamin Bachelier est osée. 

Nick Carraway est un jeune architecte. Il s’installe à Shangaï, à sa grande surprise dans un des quartiers les plus huppés. Il y loue une petite bicoque sans prétention, coincée entre de somptueuses villas. Il se retrouve proche d’une de ses cousines, Daisy, mariée au riche Tom Buchanan. Lors du premier repas pris chez eux, il fait la connaissance de Jordan Baker, joueuse de golf professionnelle et plutôt attirante. C’est lors de ce repas qu’est aussi évoqué LE notable du coin, Jay Gatsby.

De lui, on ne sait pas grand-chose. Voisin de Nick, il organise très régulièrement de fastueuses réceptions où chacun se rend, sans y avoir été forcément invité. Dandy mystérieux, il va nouer connaissance avec Nick dans l’espoir de reconquérir le cœur de Daisy, perdu quelques années avant.

On passera rapidement sur la transposition dans la Chine moderne : c’est en effet seulement après rouvert l’album que je m’en suis aperçu. Pourtant tout est évident : les traits asiatiques, le plan de la ville itou et nombre d’autres détails. Mais jamais je n’ai vu autre chose qu’un New-York d’antan. 

Il faut y voir, à mon sens, plus qu’un étourdissement du lecteur une vraie qualité dans l’adaptation du texte et dans son rendu visuel. Dès la couverture on est happé par les dessins de Benjamin Bachelier, d’une luminosité et d’une expressivité incroyables. S’il remercie l’artiste français JR pour l’hommage à son travail (les portraits gigantesques qui jalonnent les murs de la ville en particulier), on ne peut s’empêcher d’y voir la marque d’Hopper, dans les aplats de couleur, la simplicité des mises en scènes et ce léger flou qui entoure les lignes. Peut-être aussi dans l’importance accordée aux éléments architecturaux.

Cette adaptation de Gatsby le magnifique est, qu’on se le dise, de toute beauté. L’esprit du texte est respecté, on le redécouvre même sous un jour nouveau. Et sa mise en image n’est pas loin de la perfection. On ne peut que remercier les deux auteurs, Stéphane Melchior-Durand et Benjamin Bachelier, pour leur incroyable travail. Gageons que l’adaptation cinématographique à venir de Baz Luhrmann leur offrira une large visibilité.



Scénario : Stéphane Melchior-Durand - Dessins : Benjamin Bachelier 
Editeur : Gallimard - Collection : Fétiche - Récit complet.  


 

Vous avez aimé cette chronique ? Pensez à vous inscrire à la newsletter et/ou au flux RSS pour être informé des prochaines publications.